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Le jeu, c'est le travail de l'enfant

  • Ludivine
  • 28 juin 2018
  • 4 min de lecture

L'idée d'écrire quelque chose sur la libre activité de l'enfant m'est venue hier. J'étais dans un fast-food avec 2 de mes 4 enfants. Alors qu'elles jouaient librement avec d'autres enfants dans l'espace prévu à cet effet, une employée est venue fermée l'agrès car il était l'heure de raconter des histoires ! La déception était visible sur de nombreux petits visages !

Les réseaux sociaux et les médias s'en font souvent l'écho, les enfants n'ont pus le temps de s'ennuyer. Entre l'école, les devoirs, les activités extra-scolaires, l'aide aux tâches domestiques, la télévision, les ordinateurs et jeux vidéos, il n'y a plus de place pour ne rien faire.

Et en parallèle de ces agendas de Ministre qui les privent d'ennui, nos enfants voient leur temps libre réduire comme peau de chagrin. Leur temps leur appartient de moins en moins. Les adultes encadrent de plus en plus le temps des enfants. Rares sont les moments où les enfants peuvent choisir quelle activité ils vont réaliser, comment et à quel moment. Les fêtes d'anniversaires sont organisées dans des lieux où les enfants seront occupés ; à l'école, les enfants font ce que l'enseignant demande au moment il le demande ; au périscolaire ils font les activités que des animateurs ont imaginé pour eux après avoir fait les devoirs que les enseignants leur ont donné ; à la maison on leur demande d'aider aux tâches domestiques, de faire leurs devoirs, de s'entraîner à leur instrument de musique, d'aller prendre leur douche, etc. Les moments de libre activité sont rares. Et d'ailleurs, la libre activité peut aussi être une activité de non-faire, d'ennui.

Dans les années 40, Emmi Pikler, pédiatre hongroise, a mis au point la motricité libre à partir de ses observations au sein de la pouponnière Loczy. L'un des principes fondamental dans cette manière d'accompagner les bébés dès leur naissance est la libre activité. L'adulte couche bébé sur le dos, dispose quelques jouets autour de lui, veille à son confort et sécurise l'environnement. Ensuite, l'adulte ne fait plus rien d'autre que d'observer l'enfant et de verbaliser de temps à autre ce qu'il voit « Oh c'est difficile on dirait, d'attraper ce jouet. Il est juste un tout petit peu trop loin de toi. Mais tu y es presque ! Tu vas y arriver ! » Et c'est tout. Et ce principe de libre activité s'applique encore aux bébés devenus enfants puis adolescents.

Le jeu libre finalement, c'est quoi ?

Il s'agit comme dit précédemment de laisser son bébé aller à son rythme, de se mouvoir comme il le souhaite, de jouer avec le jouet de son choix parmi les 2 ou 3 que nous avons mis à côté de lui : laisse libre court à ses initiatives spontanées.

Pour les enfants plus grands, il s'agira de les laisser jouer librement aux jeux de leur choix (briques, poupées, dînette, petites voitures, doudous, construction de cabane dans la forêt, grimper dans les arbres) mais aussi à des activités considérées comme plus sérieuses telles que lire, écrire ou converser, etc. Ainsi, l'enfant décide par lui même et pour lui-même de son activité.

Pourquoi laissons-nous moins de liberté à nos enfants ?

La peur est bien souvent notre guide en la matière : peur d'une agression, d'un enlèvement, d'un accident, d'un signalement pour négligence, du regard des voisins ou des parents des copains de nos enfants, peur que nos enfants n'apprennent pas suffisamment de choses utiles et indispensables si un adulte n'est pas présent,...

Avec le développement d'internet et avec les médias, nous voyons le monde plus noir et plus dangereux qu'il ne l'est en réalité. En effet, statistiquement nos enfants ont moins de risques d'être enlevés que de mourir dans un accident de voiture. Et pourtant, nous prenons la voiture tous les jours ou presque avec nos enfants.

En quoi est-ce important ?

Quand on aide un bébé alors qu'il ne semble ni en difficulté ni en danger, on lui envoie le message implicite « sans moi tu n'es pas capable ! ». Il en va de même avec un enfant ou un adolescent, et cela d'autant plus que l'enfant parle désormais et peut donc dire explicitement qu'il a besoin d'aide. L'intervention minimum de l'adulte va permettre à l'enfant de se sentir compétent, capable et de gagner en confiance en lui.

Tous les mammifères jouent. Le jeu, outre le divertissement et la détente qu'il peut apporter, est la manière qu'ont les mammifères d'apprendre. Lorsque des enfants sont réunis ensemble et laissés en auto-gestion, ils développent tout naturellement des compétences sociales nécessaires à ce que leur jeu se déroule pour le mieux. Il vont être amenés à se donner des règles du jeu qu'ils feront évoluer selon les besoins (par exemple s'il y a dans le groupe des enfants plus jeunes qui courent moins vite), ils seront amenés à faire face à des désaccords et des conflits et devront faire preuve d'empathie, ils apprennent à coopérer et s'entraider (par exemple pour construire un cabane à plusieurs), ils développent des compétences psycho-motrices et des compétences cognitives telles que observer, explorer et formuler des hypothèses (« si je fais ça comme ça, il va se passer ça... Ah ben non il s'est passé autre chose. »). Ils découvrent des lois de la physique, le monde animal et végétal... La liste pourrait être encore longue. La libre activité de l'enfant est une source inépuisable d'apprentissage et d'épanouissement.

Je n'aime pas les injonctions surtout celles qui nous incitent à faire encore plus et encore mieux dans nos vies déjà tellement remplies, et à faire encore plus fort, à être plus performants et plus compétitifs. Ici, il s'agit de faire moins et de laisser plus de liberté à nos enfants pour réaliser les activités de leur choix.

Et si moins c'était mieux...

Si vous avez envie d'approfondir tout cela, je vous recommande la lecture du livre du Dr Peter Gray, Libre pour apprendre qui explique tout cela fort bien, études scientifiques à l'appui, ainsi que le livre d'André Stern, Jouer.

Et aussi ces vidéos :

Le jeu, Idriss Aberkane : https://www.youtube.com/watch?v=QZ8lbcYJZ-8

5 dangers pour les enfants, Gever Tulley, Tedx : https://www.ted.com/talks/gever_tulley_on_5_dangerous_things_for_kids?language=fr

Le paradoxe de la violence : http://www.mercialfred.com/topos/paradoxe-violence-monde

Malgré les apparences, le monde est de moins en moins violent : https://www.franceinter.fr/emissions/la-revue-de-presse/la-revue-de-presse-18-novembre-2017

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