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Tour d'horizon des articles récemment parus sur la charge mentale

  • Ludivine
  • 21 févr. 2018
  • 8 min de lecture

La charge mentale, on en entend beaucoup, beaucoup, beaucoup parler. Des articles paraissent dans la presse, des livres commencent à sortir en librairie. C'est le sujet du moment. Et pour cause ! J'ai eu envie de faire un peu le tour des tout derniers articles sur ce sujet. Mais avant de faire ce petit tour d'horizon, prenons le temps de rappeler ce qu'est la charge mentale ?

La charge mentale dans le contexte de la vie de famille c'est l'organisation et la planification de ce qui concerne le couple et la famille s'il y a des enfants. Dans une entreprise, c'est souvent un job en soi. Par exemple, dans une entreprise de transport en communs, il y a une personne qui a pour travail de planifier le temps de travail des salariés, de gérer les congés, les rtt, les maladies, etc. On est rarement à la fois le responsable d'un projet et l'une des personnes qui en exécute les différentes tâches. Dans les familles ce sont le plus souvent les femmes qui sont à la fois responsables de la charge mentale et de l'exécution des tâches, soit les 75% du travail à porter seule.

Depuis qu'Emma en a fait une BD, la charge mentale tout le monde en parle. J'allais dire qu'elle est alors entrée dans tous les foyers. Mais en fait, elle s'y était déjà installée avant la BD. Insidieusement, subrepticement, la charge mentale accompagne parfois clandestinement nos couples. La BD d'Emma fut une révélation pour de nombreuses femmes. Et le sujet fait depuis débat dans de nombreuses chaumières.

Titiou Lecoq Libérées

Titiou Lecoq dans son livre "Libérées ! Le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale" écrit que dans bons nombres de couples la répartition est de l'ordre de 2/3 pour Madame et 1/3 pour Monsieur. Et dans ce cas, Madame considère que la répartition est équitable (et non égalitaire hein). C'est équitable parce que c'est mieux que rien. Ou c'est équitable parce qu'elles travaillent moins ou même parce qu'elles sont au foyer (or quand les femmes passent à temps partiel ou cessent leur activité professionnelle, ce n'est pas pour se mettre les doigts de pieds en éventail au bord d'une piscine avec un cocktail et un livre. C'est pour s'occuper de leurs enfants). Equitable aussi, parce que nous autres femmes d'aujourd'hui, avons tendance soit à nous comparer à ce que l'on voit ailleurs chez nos voisin-e-s, nos ami-e-s, nos cousin-e-s, etc. Et là on se dit qu'on est bien mieux lotie parce que nous notre conjoint il fait la lessive (ou la cuisine ou il donne le bain au bébé ou etc). Ou bien nous nous comparons à des modèles du passés comme nos parents, nos grands-parents. Et là c'est sûr, les hommes d'aujourd'hui en font généralement un peu plus que nos pères et nos grands-pères. Ce qui est donc considéré comme équitable l'est depuis un point de vue biaisé et se trouve en fait être inégalitaire. Mais elles s'en accommodent pour la paix des ménages. Et on ne peut pas dire le contraire, ça marche. La paix des ménages est sauve... En tout cas pour un temps !

Depuis, la popularisation du concept de charge mentale, ouf, la science est venue au secours des hommes. Ils n'y sont pour rien s'ils ne font pas leur part du travail domestique et parental et s'ils ne prennent pas la charge mentale du foyer. Les hommes sont immatures jusqu'à 43 ans ! (1) Voilà ! Mesdames si vous êtes hétérosexuelles, soit vous épousez des hommes de plus de 43 ans. (Attention toutefois ils sembleraient que certains hommes de plus de 43 ans bien qu'étant en principe devenus matures ne font pas davantage leur part du job) soit vous restez célibataires. Une question se pose tout de même, alors que dans le monde du travail, les hommes occupent les postes les plus hauts dans la hiérarchie, comment font-ils pour manager leurs équipes, pour tenir la barre (sans jeu de mot) de leur entreprise, mener à bien les projets qui leurs sont confiés ? Comment ? Quid de leur immaturité cérébrale ? Le cerveau des hommes seraient-ils pourvus d'un hémisphère professionnel mature dès la sortie des bancs de la fac ou des hautes écoles et un hémisphère cérébral qui atteindrait la maturité domestique seulement après 43 ans ? Y a-t-il un scientifique dans la salle pour répondre à cette épineuse question ?

Dans ce même article du Huffington Post, on y apprenait que c'est tout de même bien la faute des mères (donc des femmes) car elles entretiennent le statu quo. C'est Etty Buzyn, psychanalyste qui le dit « Cette immaturité en famille est par ailleurs souvent entretenue par la mère elle-même qui ne peut s'empêcher de trouver des excuses à son fils devenu adulte ("Mon petit chéri travaille tellement toute la semaine, il peut bien jouer aux jeux vidéos le week-end pour se détendre!"), ou de souligner à outrance tous ses efforts pour s'occuper de ses enfants (parce que "à mon époque à moi, mon mari n'en faisait pas autant!"). » On ne peut décidément pas faire confiance aux femmes pour s'en sortir toutes seules puisqu'elles se mettent elles-mêmes des bâtons dans les roues ! Et si même les femmes ne savent pas ce qu'elles veulent comment les hommes pourraient-ils le savoir. Trêve d'ironie, on continue notre tour d'horizon...

Dans le Figaro Madame un article avait pour titre « Le perfectionnisme domestique étouffe les femmes » (2). Il y aurait beaucoup de choses à dire sur cet article. Mais je vais me contenter de deux ou trois remarques. Dès le titre, il nous est dit que la charge mentale, c'est la faute à notre « perfectionnisme domestique » donc c'est de notre faute à nous, les femmes. Le problème viendrait donc de notre défaut à vouloir avoir une maison parfaitement rangée et propre. Peut-être. Ce n'est sans doute pas tout à fait faux. Mais, enfin une fois de plus, c'est de notre faute car on veut tout et que ce tout soit parfait. C'est vrai que l'on a pas pensé à laisser les poubelles s'accumuler, à laisser bébé dans sa couche de caca, à entasser la vaisselle dans l'évier parce que le lave vaisselle est plein de la vaisselle propre d'il y a 2 jours, à laisser les jouets du petit dernier joncher le sol pendant des jours et des jours, à laisser l'enfant avec sa rage de dents, à ne pas remplir les papiers de la colonies de vacances (c'est pas grave ils resteront seuls à la maison pendant que papa et maman iront au travail), à laisser le frigo vide (si les enfants ont faim, qu'ils mangent leur poing). Non, on s'est dit, bêtement perfectionnistes que nous sommes, qu'il fallait faire toutes ces choses. Et puis ce n'est pas comme si nous étions éduquées, nous les petites filles devenues femmes, à s'occuper des autres et à prendre soin des nôtres et de nos intérieurs (avec le joli petit aspirateur rose ou la cuisine que l'on a reçu enfant à Noël alors que nos frères recevait une panoplie de policier ou de cow boy). Perfectionnistes, peut-être mais d'un perfectionnisme éduqué et attendu des femmes par notre société.

Mais, malheureusement pour nous, il n'y a pas que notre perfectionnisme domestique qui nous étouffe. Et oui, il y a notre chronobiologie. Selon la Dr Aurélia Schneider comme nous avons des règles, nous sommes habituées à compter, donc à planifier, donc nous sommes prédisposées à nous charger mentalement ! CQFD. En plus, un argument biologique est toujours bienvenu. D'un côté, les hommes ont un cerveau immature jusqu'à 43 ans et de l'autre les femmes sont programmées pour planifier. Comment voulez-vous faire évoluer les choses puisque c'est bio-lo-gique on vous dit !?

Continuons la lecture de cette interview du Dr Aurélia Schneider, nous y apprenons non sans déception, que la télépathie n'existe pas. Dommage l'option aurait pu se révéler fort pratique. Par conséquent, à nous de demander de l'aide ! Et bien oui Mesdames la solution pour vous décharger c'est de déléguer. Donc de vous charger de la tâche de vous décharger d'une autre tâche. La boucle est bouclée. Un hic tout de même si vous devez demander de l'aide, c'est donc encore que vous portez la charge mentale de la tâche. C'est que votre conjoint considère que cette tâche vous revient mais qu'il veut bien dans son immense bonté vous prêter main forte. En réalité, dès lors que l'on choisit de vivre en couple sous le même toit et éventuellement, d'avoir des enfants ensemble, toutes les tâches domestiques et toutes les tâches parentales et donc en amont toute la charge mentale, incombent à parts égales aux deux partenaires. Pas besoin de télépathie, il n'y a souvent qu'à regarder autour de soi pour voir qu'il y a une lessive à faire, des jouets à ranger, un papier aimanté sur le frigo à remplir, une couche à changer, un réfrigérateur vide à remplir, un peu de poussière à essuyer, etc.

Heureusement, la Dr Aurélia Schneider nous offre quelques conseils pour enfin résoudre le problème de la charge mentale au sein de nos couples. Premier conseil, « On peut proposer par exemple qu’un week-end sur deux, le conjoint s’occupe de l’intendance de la maison. ». J'adore cette idée. Vraiment, mais pas selon cette alternance bancale. Car, dit autrement cela signifie que sur 14 jours, Madame gère 12 jours et Monsieur 2 jours ! Ou alors que sur 14 jours, Madame gère 1 week-end sur deux donc 2 jours et Monsieur l'autre week-end donc 2 jours. Les 10 jours restants, bah...

Deuxième conseil, se décentrer dans le temps c'est à dire relativiser la tâche non faite en se projetant dans 5 ans"autrement dit se demander si telle ou telle chose qui nous exaspère aura une quelconque importance dans cinq ans.". Par exemple, cette vaisselle qui attends dans l'évier aura-t-elle une quelconque importance dans 5 ans ? « Ben non, évidemment pas. C'est vrai, laissons couler, on ne va quand même pas se disputer pour si peu. Je le ferai demain matin après une bonne nuit de sommeil. » Par contre, les 10 vaisselles non faites qui ont dû attendre dans l'évier, les toilettes jamais récurées, le repas jamais préparé, etc. Oui dans 5 ans, tout cela va s'être cumulée. Et là, clairement chacune de ces petites choses cumulées non prise en charge par notre conjoint vont avoir un réel impact sur notre vie et pas des moindres : reproches, rancœurs, burn-out, disputes répétées, baisse du désir sexuel, maladies, séparation. Je propose donc de se distancier dans le temps de ce conseil afin de ne pas se distancier dans le temps de son partenaire.

Troisième conseil salvateur, « Enfin, se faire du bien, aimer son corps, faire attention à soi. On peut s'offrir une douceur de temps en temps, aller acheter du bon thé, se poser chez soi pour le déguster, allumer une bougie… ». Oui ça ne fait jamais de mal de prendre soin de soi. Ça fait même du bien et c'est l'effet recherché. Là encore, je suis sincèrement d'accord. Par contre, ça ne fait pas la vaisselle, ça ne remplit pas les documents pour l'école, ça ne cherche pas une colonie de vacances pour l'été, ça ne prends pas rendez-vous chez l’ophtalmologiste pour le petit, ça ne passe pas la serpillière, ça ne fait pas le repas et ça ne véhicule pas le grand à son cours de théâtre ! Donc ça ne résout pas le problème.

En conclusion, si le problème persiste, on peut toujours siroter un petit thé en attendant que notre homme fête ses 43 ans !

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(1) http://www.huffingtonpost.fr/etty-buzyn/et-si-la-charge-mentale-des-femmes-etait-liee-a-une-certaine-immaturite-des-hommes_a_23344457/

(2) http://madame.lefigaro.fr/bien-etre/charge-mentale-bd-emma-interview-psychiatre-aurelia-schneider-livre-070218-146891

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